Biocarburants: les déjections ont du bon Ils devaient se rendre à Astana, la capitale du Kazakhstan, pour voir leur fille unique qui venait d’accoucher. Hélas, il n’y avait plus une goutte d’essence dans l’unique pompe du village. De toute façon, Victor Kortchevnikov et sa femme n’avaient plus un sou pour acheter du carburant : ils avaient tout envoyé à leur fille pour payer les frais de maternité. M. Kortchevnikov, ancien ingénieur de la défense soviétique, a opté pour le système D. Il a attrapé un seau et une corde et s’est rendu au WC public antédiluvien de Malinovka. Vacillant sur la margelle de bois pourrie servant d’appui pour se soulager, il a plongé son récipient dans la couche supérieure des matières fermentées. Il a versé le contenu du seau dans sa vieille voiture soviétique, l’a dilué avec de l’alcool distillé, puis a bricolé la pompe à carburant et le carburateur. La Moskvitch a parcouru 30 kilomètres sans problème. Elle n’a déclaré forfait qu’à l’approche de la maison de la jeune maman. « C’est la couche supérieure qui sert de carburant, le reste n’est que de l’eau », a expliqué le retraité au journal kazakh Express K. Tout produit d’origine biologique peut être une source d’énergie, précise le quotidien. Vu l’augmentation vertigineuse du prix du pétrole, les voisins de l’ancien ingénieur s’intéressent beaucoup à son innovation. L’histoire de ce voyage extraordinaire s’est propagée à des kilomètres à la ronde. Et l’on voit de plus en plus d’automobilistes flâner autour du WC public du village.

Courrier International
19.06.2008
244 mots